L'histoire de la Mauritanie

La Mauritanie, pays d'Afrique de l'Ouest situé entre le Sahara et l'océan Atlantique, possède une histoire riche et complexe, forgée par des influences berbères, arabes, africaines et coloniales. Le pays est habité depuis des millénaires, avec des traces de civilisation qui remontent à la préhistoire. Au fil des siècles, il se transforme en un carrefour entre les cultures nomades du Sahara et les royaumes sédentaires de l'Afrique subsaharienne.

L’histoire de la Mauritanie débute dès les temps préhistoriques, avec les premières traces humaines qui apparaissent dans la région du Sahara. Des peintures rupestres, des outils de pierre et des vestiges d'anciens villages révèlent l'existence de sociétés anciennes bien avant l'apparition des grandes civilisations. La région est alors verdoyante, dotée de lacs et de rivières, mais la désertification progresse au fil du temps, contraignant les populations à s'adapter à un environnement de plus en plus aride. Les peuples berbères, arrivés du nord, commencent à s'installer dans la région et influencent les cultures locales avec leurs traditions et modes de vie.

Au Moyen Âge, la Mauritanie fait partie de la grande zone d'influence du royaume du Ghana, l'une des puissances majeures de l'Afrique de l'Ouest. Le royaume du Ghana est riche, en grande partie grâce au commerce de l'or, du sel et des esclaves. Des routes commerciales traversent la Mauritanie actuelle, reliant les empires du Sud à ceux du Maghreb. Les caravanes de chameaux transportent des marchandises à travers le désert du Sahara, créant des connexions commerciales entre les peuples berbères, arabes et subsahariens. Cependant, au XIe siècle, les Almoravides, une secte militante islamique berbère, émergent de la région et commencent à conquérir des territoires en Afrique du Nord et en Espagne. Ils propagent l'islam et influencent profondément la Mauritanie, introduisant l'islam sunnite comme religion dominante et établissant des structures politiques basées sur la charia.

Durant les siècles qui suivent, la Mauritanie est marquée par des luttes constantes entre les tribus berbères et arabes. La région est un lieu de rencontre et de confrontation entre ces deux groupes, avec les Arabes cherchant à établir leur domination sur les tribus berbères locales. Cela entraîne des conflits continus, notamment entre les Banu Maqil, une tribu arabe puissante, et les tribus berbères Sanhadja. Au XVIe siècle, un processus appelé la « Zwaya » ou « zawiya » aboutit à une forme de paix relative, où les tribus berbères se spécialisent dans l'enseignement religieux et le commerce, tandis que les Arabes s'occupent des questions militaires et politiques. Cet arrangement préfigure la structure sociale de la Mauritanie contemporaine, avec une division nette entre les élites religieuses et guerrières.

Au XVIIIe siècle, la région commence à attirer l'attention des puissances coloniales européennes, notamment la France. L'intérêt français pour la Mauritanie s'intensifie au XIXe siècle, à la suite de l'expansion coloniale en Afrique de l'Ouest. En 1903, la Mauritanie est intégrée à l'Afrique-Occidentale française (AOF) et devient un protectorat sous contrôle français. Cette période coloniale est marquée par une réorganisation politique et économique de la région. Les Français tentent d'imposer leur administration, souvent en s'appuyant sur les élites locales pour gouverner. Cependant, la domination française est loin d'être absolue. De nombreuses tribus résistent à la colonisation, notamment dans les régions du nord, où les forces françaises doivent faire face à une résistance armée persistante.

L'administration coloniale introduit de nouvelles infrastructures, telles que des routes et des écoles, mais les bénéfices de ces développements sont limités et ne profitent souvent qu'à une petite élite. Les Français cherchent également à exploiter les ressources naturelles du pays, notamment le minerai de fer, qui devient une des principales richesses de la Mauritanie. La ville de Nouadhibou, située sur la côte atlantique, devient un important port d'exportation pour ces ressources.

L’essor du nationalisme mauritanien prend forme au début du XXe siècle, à mesure que la population commence à rejeter la domination coloniale. Des intellectuels mauritaniens émergent et commencent à plaider pour une plus grande autonomie. Après la Seconde Guerre mondiale, une vague de décolonisation traverse l'Afrique, et la Mauritanie ne fait pas exception. Sous la pression des mouvements nationalistes, la France accorde progressivement plus de pouvoirs aux Mauritaniens. En 1958, la Mauritanie obtient le statut de république autonome au sein de la Communauté française, une étape importante vers l'indépendance complète.

Le 28 novembre 1960, la Mauritanie proclame son indépendance, avec Moktar Ould Daddah comme premier président. Ould Daddah, formé en France, tente de moderniser le pays tout en consolidant le pouvoir de l'État. Il met en place un système de parti unique en 1964, visant à centraliser le contrôle et à promouvoir l'unité nationale. Son régime adopte une politique de « mauritanisation », qui cherche à unifier les différentes communautés du pays sous une identité nationale commune, en mettant particulièrement l'accent sur la culture arabe. Cette politique provoque cependant des tensions entre les Arabes, les Berbères et les Noirs africains, ces derniers se sentant marginalisés par l'accent mis sur l'arabité.

Dans les années 1970, la Mauritanie fait face à des défis économiques et géopolitiques importants. En 1973, le pays décide de quitter la zone franc et de créer sa propre monnaie, l’ouguiya. En 1976, la Mauritanie entre dans un conflit territorial avec le Maroc et le Front Polisario concernant le Sahara Occidental, une ancienne colonie espagnole. La Mauritanie revendique une partie du territoire mais est rapidement entraînée dans une guerre d'usure avec le Polisario, qui bénéficie du soutien de l'Algérie. Ce conflit s'avère dévastateur pour l'économie mauritanienne et pour la stabilité politique du pays. En 1978, l'armée, mécontente de la gestion du conflit par Ould Daddah, renverse son gouvernement lors d'un coup d'État.

Les années qui suivent sont marquées par une instabilité politique chronique, avec une série de coups d'État militaires et de gouvernements de transition. Les régimes militaires successifs tentent de stabiliser le pays, mais ils sont souvent confrontés à des défis économiques et ethniques. La guerre au Sahara Occidental se termine finalement pour la Mauritanie en 1979, lorsque le pays retire ses revendications sur le territoire et signe un accord de paix avec le Front Polisario. Cependant, les tensions ethniques entre les Maures et les Noirs africains continuent de troubler le pays, en particulier dans le sud, où les communautés noires sont confrontées à des politiques discriminatoires et à des expropriations de terres.

En 1984, un autre coup d'État militaire porte Maaouya Ould Sid'Ahmed Taya au pouvoir. Sous son régime, la Mauritanie connaît une relative stabilité politique, bien que des tensions ethniques persistent. Ould Taya tente de moderniser l'économie du pays, notamment en encourageant les investissements étrangers et en renforçant l'exploitation des ressources naturelles. Cependant, son régime est également marqué par la répression des opposants politiques et par une politique étrangère oscillant entre des alliances avec l'Occident et le monde arabe. Ould Taya se rapproche d'Israël, établissant des relations diplomatiques avec ce pays en 1999, ce qui provoque des critiques au sein du monde arabe et au sein de la population mauritanienne.

Au début des années 2000, la Mauritanie commence à découvrir des réserves de pétrole offshore, suscitant l'espoir d'une transformation économique pour ce pays souvent confronté à la pauvreté. Cependant, la gestion de cette nouvelle richesse s'avère complexe, et les attentes sont rapidement déçues en raison de la mauvaise gouvernance, de la corruption et des faibles revenus générés par le pétrole. En 2005, Ould Taya est renversé lors d'un coup d'État militaire sans effusion de sang, organisé par une faction de l'armée mécontente de sa politique autoritaire et de sa gestion des ressources.

Après ce coup d'État, la Mauritanie entre dans une période de transition politique. En 2007, des élections présidentielles sont organisées et Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdallahi devient le premier président démocratiquement élu du pays. Son élection est saluée comme un tournant dans l'histoire politique de la Mauritanie, marquant une rupture avec les régimes militaires qui ont dominé le pays depuis l'indépendance. Cependant, son mandat est de courte durée. En 2008, il est renversé par un autre coup d'État militaire, dirigé par le général Mohamed Ould Abdel Aziz.

Sous le règne de Mohamed Ould Abdel Aziz, la Mauritanie continue de faire face à des défis majeurs, notamment la lutte contre le terrorisme. Le pays devient une cible pour les groupes djihadistes opérant dans la région sahélienne, tels qu'Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI). En réponse, le gouvernement renforce la coopération avec les puissances occidentales, notamment la France et les États-Unis, en matière de sécurité et de lutte contre le terrorisme. Ould Abdel Aziz introduit également des réformes économiques et sociales, bien que son régime soit critiqué pour sa répression des opposants politiques et des médias.

En 2019 et en 2024, la Mauritanie connaît un autre moment historique avec la première transition démocratique pacifique de pouvoir, lorsque Mohamed Ould Ghazouani remporte l'élection présidentielle et succède à Ould Abdel Aziz. Cette transition marque un tournant pour la stabilité politique du pays, bien que des défis importants demeurent, notamment en matière de droits de l'homme, de lutte contre la pauvreté et de gestion des tensions ethniques.